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22 octobre 2009

Land of the Pharaohs (La terre des Pharaons)

Curiosité sur le Nil

Pas grand chose à se mettre sous la dent en ce week-end du 15 Août. Et puis soudain, posé comme par hasard au milieu de pas grand chose, on tombe sur une pépite déterrée par une chaine du satellite, « Land of the Pharaohs » (La terre des Pharaons), pondu par Howard Hawks en 1955. Avec en plus William Faulkner à l'écriture et Dimitri Tiomkin à la musique … excusez du peu ! Alors, même s'il fait beau dehors, on se laisse tenter, c'est humain, qu'est-ce que vous voulez.

Le Pharaon Khuru (Jack Hawkins), de retour d'une de ses campagnes guerrières, décide de se faire ériger un tombeau à sa mesure, à l'inviolabilité renforcée après le pillage des tombes de ses prédécesseurs. Khuru, toujours épaulé par son Premier Ministre Hamar (Alex Minotis), embauche pour cela Vashtar (James Robertson Justice), un architecte prisonnier dont il avait pu apprécier les capacités dans une bataille où il avait affronté des fortifications conçues par Vashtar. Afin de convaincre Vashtar et malgré le sort qui lui est promis de mourir après la construction du tombeau pour préserver le secret de son accès, il s'engage à libérer son peuple soumis en esclavage. Vashtar accepte finalement le marché et la supervision des travaux. L'âge avançant, il devra secondairement accepter l'aide de son fils Senta (Dewey Martin) qui sera alors également soumis à la même perspective funeste que lui-même.

La construction de la pyramide débute donc dès qu'est promulgué le décret royal de mobilisation des bras et des ressources de l'Egypte pour ce projet. La population entame les travaux dans l'enthousiasme et l'allégresse, lesquels retombent néanmoins après quelques années de dur labeur. Pharaon doit alors trouver de nouvelles ressources pour continuer les travaux et lance une campagne d'impôts sur les provinces de l'empire. La province de Chypre affirme ne pas pouvoir supporter le tribut demandé et envoie en remplacement la Princesse Nellifer (Joan Collins). Après une rebuffade initiale, Pharaon tombe sous le charme de la belle Princesse et en fait sa seconde épouse.

Mais lorsque Nellifer réalise que le fabuleux trésor du Pharaon est en fait un viatique pour sa « seconde vie », destiné à l'accompagner dans la tombe, elle ourdit un complot contre Khuru et sa première épouse, visant à se positionner en régente du jeune fils du Pharaon.

On avait l'habitude des peplums mettant en scène l'histoire antique, ou fréquemment aussi l'histoire biblique. Les temps modernes nous avaient habitués également à un détournement vers l'horreur, quitte à la traiter sur un mode de comédie, autour de quelque histoire de momie. Mais il faut bien avouer qu'on - c'est-à-dire cette vieille baderne de Tonton Sylvain – n'avait pas coutume de voir le genre servir de toile de fond à un quasi polar, pour ne pas dire un film noir. D'où la surprise devant cette étrangeté datant pourtant de 1955.

Car si le fond visuel baigne dans le kitsch de la reconstitution d'une Egypte fantasmée, il faut bien avouer que l'histoire est ailleurs et que le vieil Howard nous ballade durant la plus grande partie du film dans une histoire dont on ne comprend finalement l'intérêt que dans les dernières scènes. On rigole tout du long sur les décors et les costumes de pacotille, sur l'historicité suspecte des personnages et des évènements, sans se douter que l'animal nous mène ailleurs, sur le terrain de la cupidité, de la jalousie, de la duplicité, plus familier à la noirceur des rues sombres de Dashiel Hammet ou de Raymond Chandler qu'au soleil cuisant de Cecil B. DeMille.

Non pas qu'à l'issue de cette bascule on se retrouve face à un monument de la psychologie ou du cinéma qui nous fasse revoir de fond en comble notre conception du monde, non pas que l'intrigue une fois révélée se trouve être d'une profondeur révolutionnaire, mais simplement la découverte nous abandonne dans le plaisir d'une surprise que le simple fait de la déstabilisation qu'elle produit oblige à une relecture entière du film dès la dernière image close. Et ce n'est certainement pas si banal.

Est-ce la raison de l'emploi pour certains rôles clés d'acteurs qu'on n'aurait jamais attendu à cet endroit ? Est-ce en préparation à cette déstabilisation qu'il est fait appel à Joan Collins pour une Nellifer difficilement crédible ou à Dewey Martin qui l'est encore moins en Senta, pour des personnages qu'on sent définitivement plus à l'aise aux bords de la Tamise ou de l'Hudson que sur les berges du Nil ? Ce serait bien là une espièglerie du vieil Howard qu'il ne faudrait pas en être autrement surpris.

Au bout du compte, coincé dans la carrière du réalisateur entre « Les hommes préfèrent les blondes » et « Rio bravo », « La terre des Pharaons », seule tentative pléplumesque de Hawks, rivalise difficilement avec ses voisins. Il jouit néanmoins d'une originalité qui mérite le détour sans pour autant devoir trop longuement encombrer les pages des anthologies du cinéma.


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