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14 octobre 2008

Pur week-end

Rideau !

On n’échappe pas à son destin.

La France s’apprêtant à se livrer pieds et poings liés à cinq années de nocturne, une idée imbécile m’est passée par la tête : autant profiter de ces dernières heures pour se vider la tête comme un condamné se siffle sa dernière bouteille de rhum, goulûment, jusqu’à plus soif et jusqu’à l’ivresse. Alors en avant pour Montparnasse et ses cinoches. Y’a quoi en ce moment ? « Spiderman 3 » ou « Pur Week-End » ? Et si on s’en tapait une double dose, juste pour être sûr de l’effet ? Allez, au diable les varices, allons-y pour les deux.

Affiche France (cinemovies.fr)

Et au bout du bout, quoi ? La gueule de bois espérée ? La douce ivresse de l’oubli ? Le trip astral anxiolytique ? … Macache ma poule ! T’as déjà essayé de fumer du thé au milieu de la nuit, quand ta tabatière tombe en panne sèche et que tous les tabacs font relâche ? A peu près le même effet : un peu d’espoir, beaucoup d’effort, un goût de navet, et puis plus rien si ce n’est une vague nausée recouvrant, plus que la sensation du manque, celle de l’espoir déçu. Sans compter celle de l’arnaque : tout ça pour ça ?

Commençons par le début : « Pur Week-End ».

David (Arnaud Henriet) purge sa peine de prison pour trafic d’herbe et quitte sa cellule pour une permission. Il dit au-revoir à Bersini (Didier Sidbon), son co-détenu, et retrouve sur le trottoir Véronique (Valérie Benguigui) qui l’attend pour passer le week-end entre amis regroupés pour l’occasion et pour une randonnée rituelle en montagne. Souhaitant marcher seul, il s’excuse et lui promet de retrouver le groupe le soir chez elle. Chaque membre du groupe est saisi également se le trajet qui mène chez Véronique: Frédéric (Kad Merad), le mari de Véronique, pendant qu’il finit sa journée de labeur de vendeur de voiture, François (Bruno Solo) dans l’avion qui le ramène, pensif, de Londres, Alex (Philippe Lefebvre), dragueur impénitent, cueillant François à l’aéroport, … et tout le monde se retrouve chez Fred et Véro, avec Sarah (Anne Marivin), l’ex d’Alex, et Sam (Jean-Noël Brouté), le thésard à lunettes qui ne sait causer que de son sujet de mémoire. Las d’attendre David, tout le monde passe à table, compréhensif, quand le retardataire se pointe enfin en fin de repas. Entre temps on a appris l’origine du groupe, Fred et Véro étant des anciens mono de la colo qui accueillait autrefois les gosses qu’étaient François, Alex, et Sam.

Au petit matin, tout le monde grimpe dans le 4x4 de Fred et direction l’Iseran par l’autoroute. En chemin, Fred reçoit de la police le coup de fil qui casse l’ambiance : David n’avait en fait qu’une permission de 24h et s’avère profiter de la situation pour se faire la belle. Dispute sur une aire d’autoroute d’où finalement tout le groupe se retrouve, plus ou moins contraint, à crapahuter dans la montagne pour aider David à rejoindre à pied l’Italie.

La poursuite s’engage, avec à la tête de la meute policière, le Commandant Papan (François Berléand), bon pépère qui garde les pieds sur terre devant une évasion de pacotille et une bande de pieds nickelés, épaulée du Capitaine Maugrion (Alexandra Mercouroff), genre de Starsky allumée et vindicative. C’est que David n’est pas le seul à avoir pris la poudre d’escampette : Bersini a aussi mis les voiles, mais lui, c’est un autre calibre de truand. Malheureusement pour David, il est la seule piste dont la police dispose dans sa quête de Bersini, alors ils ne lâcheront pas.

L’histoire vaut ce qu’elle vaut, mais bon, on a vu de choses plutôt réussies avec des scénarios plus minces. Tout est dans la qualité du reste, celle du jeu, de la réalisation, du scénario, … Et pour tout dire, c’est justement là que le bât blesse.

François Berléand a beau se mettre en quatre pour donner un peu de crédibilité à son personnage, il faut bien avouer qu’il est bien seul sur cette galère. Sa collègue semble bien plus sortie de Chateauvallon que de Miami Vice : toute en outrance, en sur-jeu, en frustrée du GIPN s’évertuant à ne pas dépasser le QI du poulet de batterie. Kad Merad pourrait s’en sortir s’il était un peu dirigé au lieu d’être livré à lui-même. Résultat : il se réfugie dans les recettes de Kad et O’, qui font mouche lorsque sont acolyte d’Olivier est dans le secteur, mais qui tombent bien à plat en son absence. Valérie Benguigui est sur le même registre, dont se sauve par instant un Bruno Solo parfois inspiré, en particulier dans ses deux scènes de colère révoltée. Même Jean-Luc Bideau réussit à caricaturer son personnage. C’est dire si le reste du casting est lui aussi à la peine.

Il faut dire que les dialogues valent leur pesant d’amateurisme qui n’est pas pour aider les meilleures volontés : un mélange de langage écrit émaillé de ci de là de quelques dérapages théoriquement contrôlés pour « faire parlé ». Un seul exemple : David évoquant la « zonzon » au milieu d’une phrase à la tonalité écrite en diable. Et quand sur ces dialogues, les acteurs se piquent de détacher chaque mot et de s’appliquer sur les liaisons, on se sent bien plus au théâtre que dans une salle de cinéma, pour ne rien dire de l’impression de réalité.

Les images pourraient sauver l’affaire, mais nous voilà abreuvés de séquences en forme de rappels des années de colo, au formalisme tentant d’évoquer un Super8 amélioré. En est-on encore à cet artifice pour signifier qu’une scène est en fait un souvenir ? Quand bien même l’époque en question ne serait pas, sur la foi des autres attributs de la reconstitution, bien postérieure à l’âge du Super8.

La musique est quasi omniprésente, et pas mauvaise, dans l’absolu, pour le choix des chansons. Le problème, s’il fallait en trouver un de plus, c’est qu’elle pioche quasi exclusivement dans le registre d’un rock’n roll bien tonique, indifférente à l’humeur de la scène qu’elle est censée soutenir.

Je suis peut-être de mauvais poil, d’ac. Mais fallait pas me promettre une comédie et me donner un machin à me tirer péniblement un ou deux sourires en une heure et demie. J’suis pas d’humeur. Et puis voir se gaspiller des talents comme ceux de Kad Merad, voire de Bruno Solo, ça me retourne le béret comme une vieille crêpe.

Comme, après ça, c’est pas « Spiderman 3 » qui a réussi à me propulser sur orbite (mais une chose après l’autre ; pour le PV de celui-la, il va falloir attendre encore un peu), c’est sans aucun antidote que j’ai dû me présenter devant l’autel de TF1.

On n’échappe décidément pas à son destin.

19h59 : nocturne moins une.

20h00 : rideau !

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