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28 septembre 2008

Les amateurs

Les filles, mode d’emploi

Tomber dessus par hasard, c’est un des miracles des petits matins d’insomnie et des chaînes cinéma du satellite. Tomber dessus sans se faire mal - et sans l’abîmer non plus, naturellement – ça devient un peu plus rare, et selon les chaînes, parfois tourner à l’exceptionnel. Mais ça arrive, alors autant en profiter. Espérer découvrir ainsi un chef-d’œuvre méconnu serait peut-être beaucoup demander, mais bon, un petit truc sympa qu’on n’aurait jamais pensé à regarder spontanément et que seul le désoeuvrement fait lascivement entamer, pourquoi pas.

Affiche France (cinemovies.fr)

Cette nuit là, j’avais ouvert le poste plein d’espoir sur la deuxième moitié de « La Chinoise » de Godard, et à la fin je n’avais toujours pas retrouvé le sommeil. Pas le moindre bâillement. C’est dire le caractère rebelle de mon insomnie, parfois. Un petit coup de zapette, et surprise ! Pascal Légitimus. Tiens, why not après tout. Un petit tour sur la fonction Programme et me voilà muni d’un minimum d’info : à un moment ou à un autre, on devrait voir arriver Jalil Lespert et Lorànt Deutsch, dans un film de 2003 de Martin Valente.

L’histoire ? Pas bien compliqué et vite rattrapée même si on a manqué le début. En reconstruisant un peu. En gros, deux copains d’une cité de banlieue, Djamel, dit JP (Jalil Lespert), et Christophe, dit Chris (Lorànt Deutsch), sont pour l’un employé dans un petit supermarché et pour l’autre chômiste. JP a une sœur, Malika (Barbara Cabrita), qui plait bien à Chris, qui lui, a une cousine, Maya (Sara Martins), qui branche bien JP. Mais les deux belles font, elles, des études et naviguent dans un milieu plus cultivé, avec des préoccupations plus « étudiantes ».

Comment attirer l’attention des belles quand on se sent si petit face à ces dames inaccessibles. A cœur vaillant, rien d’impossible ! Et voilà nos compères imaginant les stratagèmes les plus naïfs pour séduire les élues, d’abord hautaines, puis progressivement attendries par tant d’efforts et de bonne volonté. C’est qu’ils mettent le paquet, les deux courageux. Surtout Chris, le moins timide, qui se documente. Ces filles là, elles aiment la culture, alors on va se mettre à leur portée. Leur montrer qu’on n’est pas des gros nuls de cité et qu’on aussi de la sensibilité et des neurones.

Un vieux Barbara Cartland en guise de mode d’emploi de la sensibilité féminine, les voilà lancés sur la piste de la promotion intellectuelle. Le théatre ! C’est ça ! Ca, ça devrait les brancher ! Top là ! Y a Brittanicus à la MJC, et on a même des places gratuites, si on les invitait ? Ouais, mais pour que ce soit crédible, il faut qu’on connaisse un peu aussi. Banco, allons d’abord pour une séance d’apprentissage. On les invitera après.

Djamel reste, lui, imprégné d’idées plus classiques. Les filles, ça aime les sorties et les grosses voitures. Et le voilà qui emprunte la BMW d’un copain pour aller impressionner la belle. Mais les filles ont besoin d’autre chose que ça, et ça, c’est pas dans le manuel. Maya refuse l’offrande et le geste tourne en penaude déconfiture.

Là-dessus se greffent deux ramifications à l’histoire. D’une part Monsieur Meinau (François Berléand), le patron du supermarché où travaille JP, est persuadé que JP est un fils né d’une relation de jeunesse avec une ancienne vendeuse du magasin, et n’a de cesse de le prendre sous son aile. D’autre part, Jimmy (Pascal Légitimus), le fameux copain à la BMW, est en fait un truand de banlieue au grand cœur, petit roi du quartier.

Or la BMW est fauchée à JP lors du braquage de la banque où Chris fait un remplacement de vigile (Lorànt Deutsch, taillé dans une allumette, en vigile, fallait la trouver celle-là !). Et voilà nos deux pieds nickelés qui se montent la tête à penser qu’on va les accuser du casse et qui s’enfuient à la campagne pour éviter la maréchaussée, qui, de son côté, n’avait pourtant jamais douté du contraire. La cavale rurale et le retour des acolytes valent leur pesant de cacahuètes.

Avec ces ingrédients là, et en laissant mijoter à feu doux, ça nous donne une petite comédie tout à fait sympathique. Le feu doux permet de maintenir une douce fraîcheur que je n’avais pas retrouvée depuis un certain temps. Sans prétention et sans ostentation. Pas d’effets spéciaux, pas de cavalcade en voiture (en fait, juste une petite, juste pour dire) (en fait, aussi une deuxième, mais qui dure cent mètres et se finit dans un poteau … ça c’est du grand spectacle !). Pas de grands sentiments, juste des bons sentiments. Pas de grands éclats de rires, juste des sourires tranquilles et sans arrière-pensée. Pas de faux message, juste une simplicité et une naïveté bien intentionnée.

Lorànt Deutsch est dans son registre habituel et Jalil Lespert est touchant à souhait. François Berléand en fait toujours un peu trop, mais ici c’est juste dosé et pas au premier plan. Les deux donzelles sont mignonnes et pas cabotines. Robert Rollis fait une apparition pour le fun dans un dialogue à couper au couteau … Et puis aussi une apparition de Dominique Frot (la sœur de Catherine ; je ne la connaissais pas ; c’est dingue comme elle ressemble à sa soeurette).

A la fin, je n’avais toujours pas sommeil, mais ça m’était devenu complètement égal. Après tout, c’était peut-être aussi bien, non ?

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